Captain Savoy et ses Captain-Skis, seconde partie: la course dans les nuages

Précédemment, j’ai affirmé que Captain Savoy (génie de la Savoie immortelle) avait des skis, et qu’il les appelait ses Captain-Skis. J’ai dit qu’ils lui permettaient de voler dans les airs, comme pour le Black Racer de Jack Kirby, avatar assuré de saint Maurice, patron de la Savoie et donc skiant, parmi les astres et les galaxies où il accomplit ses missions. De même en va-t-il de Captain Savoy !

Mais un jour, ce héros eut d’utiliser ses skis une occasion moins dramatique. Il effectua une course avec un autre héros porteur de skis.

En effet, Captain Corsica, génie de la Corse immortelle, avait décidé de visiter la Savoie : il avait entendu parler du mont-Blanc et de ses sœurs alpines, et désirait voir s’ils étaient aussi beaux qu’on le lui avait dit – et si on pouvait les comparer avec les belles montagnes de sa Corse si chérie.

Il monta donc dans son vaisseau spatial (si semblable dans le ciel à un nuage, en tout cas apparaissant comme tel aux yeux faibles des mortels naïfs), et il s’éleva dans les airs depuis sa base secrète de la Restonica, arrachée jadis au terrible Bulettone avec l’aide de Captain France. Se dirigeant droit vers le nord il parvint bientôt à proximité du mont-Blanc : il planait au-dessus des montagnes et des vallées de Savoie.

Il n’avait pas oublié de prendre ses skis, forgés par les nains adroits de son père Cyrnos, pour s’essayer sur les neiges de Savoie. Ils brillaient, de leur éclat cristallin, à l’arrière de sa cabine, elle-même constellée de voyants lumineux et colorés, à la façon de joyaux qu’eût animé une énergie propre.

Car Captain Corsica n’avait d’autre carburant que le feu des étoiles, comme cela sera peu compris des savants actuels : il disposait, en effet, d’une technologie venue du plus lointain futur, et qui restera longtemps incompréhensible à nos ingénieurs ou à nos philosophes. C’est pourquoi, au sens littéral, sa cabine n’était pas tant constellée de voyants lumineux électriques que de pierres précieuses luisant par elles-mêmes, fragments d’étoiles déposés là par l’art des nains de Cyrnos.

Or, cela n’empêchait pas (tout au contraire) qu’on ne maniât cet astronef en touchant ces joyaux comme s’il se fût agi de boutons. Car cette réalité cachée que nous décrivons est la source des inventions naïves de la science-fiction – telles qu’on les a vues au cinéma, par exemple chez l’excellent George Lucas. Et Captain Corsica pouvait jeter des flots d’énergie cosmique, cristallisés et épaissis, sur ses ennemis, et des batailles avaient lieu dans le ciel, que les mortels prenaient pour des éclairs et du tonnerre – et qui étaient des combats de vaisseaux spatiaux dignes du plus épique des space-operas.

Mais Captain Savoy n’était pas en reste, et, de sa vision suprasensible (qui défiait les brumes où se cachent les vaisseaux spatiaux extraterrestres ou angéliques), il vit le navire volant de Captain Corsica, planant brillant dans le ciel.

Car il faut savoir que les yeux de Captain Savoy étaient comme deux joyaux lumineux, des rubis éclatants, comme s’il eût été aveugle ! C’est qu’il voyait au moyen d’autres yeux, qu’on ne voyait pas : il en avait juste au-dessus de lui, c’était ceux de l’ange qui continuellement le guidait, et se tenait pour ainsi dire sur ses épaules – sans pour autant qu’il ne lui pesât en rien : tout au contraire, il en tirait une grande force.

Lui-même émanait de cet ange : son corps avait été tiré de sa substance, lorsqu’il avait ressuscité après avoir péri dans un accident de voiture. Car il en était ainsi : Captain Savoy avait été refait sur terre sous une forme sublime, après que, simple mortel, il avait connu un terrible accident qui l’avait fait périr. Dès lors, devenu héros – devenu homme glorieux –, il pouvait accomplir de véritables missions angéliques !

Et, en apercevant le vaisseau de Captain Corsica dans le ciel, il fut d’abord circonspect. Comme il le voyait se diriger vers les pentes claires du mont-Blanc, il prit ses skis, au cas où, les attacha sur son dos, et de sa bague d’émeraude se bâtit, à son habitude, un pont vert vers le lieu de stabilisation du vaisseau-nuage, sur la face nord du prince des montagnes. Il voyait bien, à travers quelques volutes sans épaisseur, la coque effilée et luisante du vaisseau de Corse – ses ailes, son feu doux et coloré, étoilé d’éclats luisants, et ses fenêtres cristallines à travers lesquelles le viril visage de Captain Corsica, pilote chevronné, se montrait à ses yeux. Son profil aquilin, revêtu d’une cagoule noire qui lui faisait une seconde peau, ne laissait voir que des yeux pareils à des diamants, reflétant l’éclat des astres même en plein jour – si profond était son regard de héros de la Corse immortelle !

Captain Savoy se dirigea vers le vaisseau spatial argenté et constellé de pierreries, et bientôt, depuis la fenêtre de son cockpit, Captain Corsica le vit ! Et voici, il suspendit son vaisseau sur un piton qui voisinait le sommet du mont glacé, fit coulisser la porte métallique de sa nef éthérique, et attendit que Captain Savoy fût à portée de voix, le regardant fixement, pour parler.

Ce qu’ils firent et se dirent sera raconté une autre fois, néanmoins, car cet épisode commence à être trop long.

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